GALA #1353

 

ARTISTE HORS CADRE 


Il brise les codes pour mieux se les réapproprier. Rencontre avec un homme libre.

 

GALA : Pourquoi cette création monumentale et onirique. Besoin d'air, qui ouvre le Palais des beaux-arts de Lille sur le ciel ? 

 

MATHIAS KISS : Cette installation est le résultat d'une longue réflexion sur mon passé. Quand je travaillais dans la restauration de monuments historiques, je me suis spécialisé dans les cieux peints. J'ai débuté à quatorze ans, je faisais alors mon apprentissage auprès des Compagnons du devoir. Même si je leur dois tout, c'était un environnement très rigoureux et moi j'avais besoin de sortir du cadre. Bien entendu je me suis approprié cet héritage et cet académisme, mais pour mieux m'en extraire. Et puis, Besoin d'air c'est aussi un hommage a la peinture des beaux-arts et à celle du XVIIIème siècle avec une certaine dramaturgie.

 

GALA : Pourquoi aimez-vous tant detourner, voire casser les codes ? 

 

MK : Évidemment, c'est en réaction aux Compagnons dont les symboles sont le compaset la règle. Après avoir engrangé tout ce qu'ils m'ont appris, j'ai ressenti le besoin d'une rupture. Apprenti, je respectais leurs diktats techniques et esthétiques et cela m'allait très bien… Jusqu'au jour où j'ai ressenti la nécessité d'inventer mes propres règles. Mon métier ne m'a pas formé, il m'a élevé ! 

 

GALA : Ayant travaillé en tant que compagnon à Notre-Dame de Paris, que pensez-vous des projets plus contemporains, comme cette toiture en verre pour sa reconstruction ?

 

MK : Je trouve cette idée formidable. Si cela devait se faire beaucoup de gens s'y opposeront comme ce fut le cas pour la pyramide du Louvre, pour les bouches de métro de Guimart... Je préfère cela plutôt que de faire du faux vieux. Bien entendu, il faudra du temps pour le digérer, mais dans trente ans les gens se déplaceront pour venir voir ce toit en verre. 

 

GALA : Quelles sont vos envies d'artiste aujourd'hui ? 

 

MK : J'ai tout fait pour m'éloigner des monuments historiques parce que je trouvais cela vieillot. J'ai peut-être idéalisé l'art contemporain en essayant de m'en approcher... Maintenant que je me suis trouvé, j'assume de plus en plus la d'ou je viens et j'aimerais y retourner, libre. En n'étant plus dans l'exécution mais dans la création et travailler pour une commande publique, comme ont pu le faire Braque ou Chagall. Sans comparaison aucune, ce sont là mes fantasmes artistiques ! Ce serait un moyen de délivrer un message culturel fort de transmission et de pédagogie intergénérationnel. 

 

GALA : Qu'est-ce qui vous motive le matin ? 

 

MK : L'idée d'accomplir ma journée et de pouvoir me recoucher. 

 

GALA : Qu'est-ce qui est rare à vos yeux ? 

 

MK : Le temps. 

 

GALA : Votre rêve de création le plus fou ?

 

MK : Ce serait de faire un ciel façon Mathias Kiss dans un théâtre à l'italienne.

 

GALA : Deux mots pour vous définir ? 

 

MK : Libre, vraiment, et excessif... ce que l'on me fait souvent remarquer. Lorsque je ris par exemple, je ris trop fort. Lorsque je bois, je bois trop. En fait, je suis trop !

 

 

Entre art et artisanat, ses oeuvres conjuguent les techniques et imposent leur propre style. Déroutantes, elles s'émancipent des figures Imposées comme le démontre son miroir Sans 90°.

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